6000 postes en moins au CAPES/le CPE pour sauver les jeunes du chômage : ce gouvernement ne nous prendrait-ils pas pour des c… ?
Le gouvernement Villepin/Sarkozy/Chirac a décidé le lundi 16 janvier 2006 d’ouvrir une nouvelle brèche dans le Code du Travail et de remettre une nouvelle fois en cause la règle du CDI (Contrat à Durée Indéterminée) en instaurant le CPE (Contrat Première Embauche). Ce CPE est bel et bien une extension du Contrat Nouvelle Embauche (CNE) puisque comme lui c’est selon le gouvernement, « un CDI avec une période d’essai de deux ans au cours de laquelle le chef d’entreprise pourra à n’importequel moment, mettre fin au contrat ». Pour un CDI, la période d’essai est d’environ trois mois. Le CPE serait ouvert aux moins de 26 ans qui seraient employé-e-s dans les entreprises de plus de 20 salarié-e-s, tandis que le CNE était ouvert à tous les âges et uniquement aux entreprises de moins de 20 salarié-e-s. Bien évidemment, puisque les patrons vont dorénavant avoir le choix au moment d’embaucher un moins de 26 ans, entre un CDI et un CPE, ils choisiront nécessairement le CPE en raison des facilités de licenciement qu’offre ce contrat. Conclusion : plus aucun moins de 26 ans ne sera embauché-e en CDI.
On a affaire ici à une régression sociale majeure car c’est une véritable remise en cause de l’acquis social fondamental que constituait le CDI. Les salarié-e-s ont lutté pour cet acquis depuis plus d’un siècle et depuis plus d’un demi-siècle, il était devenu la norme d’emploi. Il constituait un droit fondamental du salarié-e et contrebalançait la domination qu’il/elle subissait et subit toujours dans l’entreprise. Or, au nom de quoi se fait cette remise en cause ? Au nom de l’existence d’un chômage des jeunes, à savoir dans les conventions statistiques des 16-24 ans. L’INSEE l’établit environ à 20% alors qu’il est actuellement de 9,6% dans la population totale, toujours selon l’INSEE. Mais ce taux de chômage ne prend pas en compte la population inactive, la population qui ne recherche pas effectivement un emploi, puisque le taux de chômage représente le rapport entre la population active au chômage (population recherchant effectivement un emploi mais qui n’en occupe toujours aucun) et l’ensemble de la population active (population recherchant un emploi). C’est ici que se joue le côté mystificateur de ce désormais fameux « chômage des jeunes » : dans la catégorie des 16-24 ans, seulement un individu sur quatre recherche un emploi. Les autres sont en général étudiant-e-s ou lycéen-ne-s. Dès lors, cette catégorie d’âge si on la prend dans sa totalité et pas seulement dans sa partie active, compte en pourcentage autant de chômeur-euse-s que les autres classes d’âge. Le chômage ne touche pas plus les moins de 26 ans que les autres classes d’âge.
Alors oui il est peut-être probable que le CPE entraîne dans les mois à venir des créations nettes d’emplois ; néanmoins ces emplois vont remplacer des CDI qui auraient dû se créer. Ils vont surtout condamner des dizaines de milliers de jeunes à enchaîner les CPE, voire toutes les formes d’emplois précaires (intérims, CDD, temps partiels…) puisque le CPE n’est pas incompatible selon le gouvernement avec les autres contrats précaires. Bien évidemment, entre ces emplois il y aura le chômage avec des indemnités ridicules versées par l’Etat. C’est là encore une nouveauté car avant c’était aux patrons de le faire. Encore une nouveauté avec le couple CPE/CNE : c’est la première fois depuis un demi-siècle que les patrons peuvent licencier sans motif.
Il y a fort à parier que le CPE constitue pour les patrons ce que les économistes nomment « un effet d’aubaine », à savoir que ce contrat remplacera dans la plupart des cas un emploi qui aurait dû être un CDI. C’est dans cet effet que les contrats précaires instaurés depuis une dizaine d’années en France, se sont quasi-systématiquement enfoncés. Au final, l’effet sur le taux de chômage est quasi-nul.
En bref, le CPE condamne les moins de 26 ans à un sous-emploi qui enfoncera une grande partie d’entre elles/eux dans des situations d’extrême précarité. Il transforme les jeunes en une main d’oeuvre docile, corvéable à merci, qui n’aura pas l’occasion pendant les deux ans du CPE de jouir du droit de réclamer des heures supplémentaires non payées ou encore de faire grève. Le principal argument du gouvernement consiste à dire que les jeunes sont plus touché-e-s par le chômage : or, cet argument, on l’a vu repose sur une mystification statistique et il constitue une fantastique hypocrisie quand on sait que le même gouvernement vient de supprimer plus de 6000 postes au concours du CAPES.
SUD étudiant-e Lille est convaincu que le CPE constitue la dernière étape avant la réforme du Code du Travail que le gouvernement a prévu d’ici quelques mois, et avant ce qui devrait être la fin du CDI comme norme d’emploi. Dans cette perspective, notre organisation appelle l’ensemble de la jeunesse à se joindre à l’ensemble du salariat, pour lancer d’ici quelques semaines une vaste mobilisation qui permettra de faire céder le gouvernement sur le couple « CPE/CNE », ainsi que sur ses autres « réformes » libérales/réactionnaires.